Depuis les sources historiques les plus anciennes, les tablettes cunéiformes de Mésopotamie, la chirurgie apparaît dans les textes médicaux. L’Égypte, la Grèce et le monde romain ont également eu recours à cette discipline, qui s’est enrichie de nombreuses connaissances anatomiques au fil des siècles. Elle a ainsi permis de multiplier les pathologies et blessures qui pouvaient être soignées grâce à ces opérations, bien que les complications et les infections restaient nombreuses à la suite de tels traitements.
Parmi les fonction de l’asû, le médecin, il y avait la consultation de patient et la pose d’un diagnostic, la préparation des médicaments, mais aussi les interventions chirurgicales. Ces dernières pouvaient consister en incisions ou en scarifications. Il appliquait ensuite des pansements imprégnés d’huiles et d’herbes. Ces bandages et tampons pourraient avoir été, la plupart du temps, fabriqués en laine. En effet, cette matière était très accessible en Mésopotamie. Mais le lin, le coton et même le crin de cheval étaient aussi attestés.
Il semble que les sutures de plaies étaient déjà pratiquées dès la Haute Antiquité. Peut-être aussi réduisait-il les fractures, bien que cela ne soit pas assuré. En effet, il est possible que seule l’application de liniments ait servi à apaiser les fractures. Il est probable qu’il avait aussi en charge les soins dentaires.
Les sources des périodes assyrienne et babylonienne attestent également de la castration de jeunes esclaves sous la supervision d’un médecin. Certains d’entre eux pouvaient ensuite entrer au service de la Cour, mais le taux de mortalité devait néanmoins être relativement élevé. Cette opération mutilante apparaît également comme sanction dans des textes de lois.
Par contre, les Mésopotamiens n’avaient presque aucune connaissance de l’anatomie humaine interne. Ils ne pratiquaient pas d’autopsies pour développer ces connaissances. En conséquence et logiquement, des opérations internes sur les vivants ne sont pas attestées non plus par les sources.
Le papyrus Edwin Smith est considéré comme un traité de chirurgie égyptien. Ce texte compte vingt-deux colonnes. Les dix-sept premières sont toutes consacrées au traitement des blessures survenues à la tête, au visage et au torse d’un patient. Elles sont aussi diverses que des fractures du crâne, des lacérations ou des luxations de vertèbres cervicales.
Ces blessures pouvaient avoir été causées tant par le travail sur le terrain que, sans doute dans la majorité des cas, par les combats sur un champ de bataille.
Pour chaque type de dommage corporel, le texte est toujours organisé selon le même schéma. Il commence par une description de la blessure aussi détaillée que possible. Ensuite, le médecin se prononce sur les possibilités ode réussite du traitement. Finalement, une description détaillée de la procédure a mettre en œuvre est exposée.
Si une intervention chirurgicale était jugée nécessaire, le médecin égyptien pouvait faire appel à un auxiliaire spécialisé dans ces actes. Ce dernier était nommé sa-hemen, l’homme au couteau.
Le pseudo-Galien, dans un traité intitulé Introductio sive medicus, estime que c’est la pratique de la momification, qui a permis l’invention de nombreux traitements chirurgicaux. Cet auteur anonyme était probablement un médecin originaire d’Égypte, qui vécu à l’époque romaine. Il devait sans doute disposer d’informations relatives à la médecine égyptienne pharaonique.
C’est probablement la période alexandrine qui a le plus permis de progrès dans la chirurgie antique, mais parfois par des pratiques peu orthodoxes, telle que la vivisection sur des criminels.
Chirurgie oculaire, chirurgie osseuse, … de nombreux aspects de cette discipline apparaissent dans les papyrus et ostraca de l’Égypte gréco-romaine.
La chirurgie dans les sources romaines et la question de la douleur
Dernier recours de la médecine antique, lorsque le régime / la diététique et les traitements médicamenteux ne peuvent venir au secours du malade, la chirurgie était pratiquée par la majorité des médecins dans le monde romain, comme nous l’avons déjà signalé. Comme on peut aisément l’imaginer, elle était étroitement liée à la douleur et à sa gestion, car la plus invasive et violente des disciplines médicales.
Celse, qui vécu à l’époque de l’empereur Tibère, disait, à propos de la chirurgie romaine : « Le chirurgien doit être assez compatissant pour vouloir la guérison du patient qu’il a pris en charge. Mais il ne doit toutefois pas, en se laissant apitoyer par ses cris, se hâter plus qu’il n’est souhaitable ni couper moins qu’il n’est nécessaire ».
Sénèque, auteur stoïcien du Ier s. de n. ère, qui fait mention à plusieurs reprises de pratiques chirurgicales pour tenter de rendre plus concrets certains concepts philosophiques, mentionne deux grandes catégories d’opérations : le fer (incision au scalpel) et le feu (cautérisation au fer rouge).
Parmi les pratiques plus précises énumérées dans son œuvre, on retrouve notamment la trépanation, l’amputation, l’ablation d’une région nécrosée ou ulcérée de l’organisme, l’ablation osseuse, la réduction d’une fracture ou d’une luxation, l’extirpation des veines et varices, la phlébotomie (saignée) pour diminuer la pression sanguine, la chirurgie viscérale, ou encore de l’appareil uro-génital.
Un exemple archéologique d’une trépanation, à laquelle la patiente a survécu quelques semaines (entre un et trois mois), a été identifié lors de fouilles de sauvetage à Rome. De tels témoignages directs sont rares et peuvent utilement documenter les propos des sources littéraires.
C’est la douleur physique que cette pratique médicale cause qui intéresse Sénèque pour ses comparaisons avec la philosophie, présentée comme une médecine de l’âme. L’emploi de description chirurgicales sont l’occasion pour lui de proposer des exercices spirituels de visualisation de l’épreuve à endurer. Mais ses exemples documentent utilement la chirurgie romaine, pour laquelle l’anesthésie était encore sommaire, même si plusieurs substances étaient connues pour tenter d’atténuer les souffrances du patient (voir l'article sur les substances thérapeutiques issues de l'univers végétal). Il met d’ailleurs en lien les douleurs provoquées par ces opérations et la torture, dont certains instruments étaient communs.